Il y a deux ans débarquait dans les salles l’adaptation cinématographique de Cinquante nuances de Grey, « roman » érotique qui fut un très grand succès commercial, et ce malgré une réputation absolument catastrophique. Écrit par la romancière E. L. James, Cinquante nuances… était à l’origine une fan-fiction de la célèbre saga Twilight. Apparemment frustré de ne pas en savoir plus sur la sexualité des protagonistes, E. L. James eu la très mauvaise idée d’imaginer une relation sado-maso entre les personnages. Mais face aux plaintes reçues, elle modifia les noms et l’histoire pour en faire une saga à part. Écrit avec les pieds, E. L. James a malgré tout réussi à en tirer 4 bouquins (une trilogie principale, puis un quatrième reprenant les éléments du premier livre vu du point de vue de Grey histoire de se faire un peu de pognon en plus), et succès oblige, Hollywood est arrivé pour en faire une adaptation. Lamentable de A à Z, le premier film était réalisé par Sam Taylor-Wood. Véritable téléfilm du samedi après-midi sur W9, le film était avant tout particulièrement con et ne présentait absolument aucun intérêt…
Il est assez marrant de se rendre compte que Sam Taylor-Wood a été virée de l’entreprise pour divergences artistiques. Non pas que d’apprendre le renvoi de quelqu’un est amusant, mais ce qui est considéré comme divergences artistiques pour E. L. James est tout simplement le fait que la réalisatrice du premier film avait choisi de modifier certains éléments du livre. Donc le propre d’une adaptation n’est même pas une notion qui a été pris en compte par l’écrivaine…
Enfin bref : James Foley remplace Sam Taylor-Wood à la réalisation sur ce deuxième opus. Est-ce que cela provoque une véritable différence entre les deux films ? Cette différence de metteur en scène provoquerait-elle un sursaut artistique pour ce deuxième épisode ? Évidement que non ! Aussi mal filmé que le premier, ce deuxième opus reprend là ou le premier s’arrêtait : suite à sa rupture avec Christian Grey, Anastasia Steele décide de se consacrer à sa carrière d’éditrice. Refusant toute autre aventure avec un homme, celle-ci succombe à nouveau au charme de Grey lorsqu’il revient vers elle. Malgré ses tourments intérieurs, il lui propose un nouveau contrat pour leur relation, à savoir, une vraie relation amoureuse, cette fois. Mais celui-ci s’avère angoissé, et le retour de deux de ses anciennes relations ne viendra évidemment pas changer les choses…
Voilà. Ça c’était le pitch officiel. Maintenant, faut pas déconner non plus : le film ne raconte absolument RIEN. Ça enchaine effectivement des scènes montrant les tourments de Grey, mais n’arrive jamais à faire vraiment le pont entre toutes les différentes histoires. On voit effectivement les ex de Grey, mais il est impossible de vraiment réussir à voir un lien scénaristique entre ces différentes histoires. La faute à une écriture particulièrement hasardeuse, ne cherchant jamais à donner un sentiment de vraisemblance dans l’enchaînement des séquences, et se contentant donc d’enchainer mécaniquement les scènes obligées du genre. Ainsi, on passe d’une séquence d’engueulade à une scène de cul sans vraiment avoir droit à une transition logique entre ces scènes, la palme du genre revenant clairement à une séquence incluant une ex ayant très mal vécue sa rupture avec Christian : une tension se met en place, d’autant plus que l’intrusion de ce personnage s’avère être vraiment imprévu pour le coup, mais une fois la scène finie, plus jamais nous n’entendrons parler de cette histoire. Par ailleurs, conclure ces sous-intrigues de manière particulièrement expéditive et contre-productive passerait presque pour le concept du film tellement celui-ci regorge de conclusions surréalistes dans le genre. La voiture d’Anastasia se fait saccager ? « Pas grave, je t’en rachète une autre », lui balance Grey 30 secondes après la découverte de l'épave. Le patron d’Anastasia tente de la violer ? « C’est bon il est viré et plus jamais il ne te fera de mal », lui dit Grey une minute après la scène de tentative de viol la plus molle que l’on ai vu depuis longtemps. Christian est mort dans un accident d’hélicoptère ? « C’est bon je vais bien », balance-t-il 2 minutes après qu’on nous ai montré le « crash ». Le tout n’étant clairement pas aidé par les acteurs, tous plus fades les uns que les autres, on se retrouve donc à suivre des personnages sans consistance déambuler de building en soirées déguisées sans que l’on puisse voir un quelconque intérêt à ce qu’ils sont en train de faire…
L’autre point assez hallucinant du film consiste en l’élément vendeur du bouquin/film : les scènes de fesses. Non pas que l’idée d’assister à des séquences de cul au cinéma soit la chose la plus attrayante que l’on puisse entendre, mais c’est tout de même la chose qui fut la plus mise en avant lorsque l’on évoquait ce film pour en faire la promo. Il est donc d’autant plus surprenant de voir que l’élément le plus vendeur soit aussi le plus malhonnête, étant donné que le film de James Foley est probablement le film « érotique » le plus soft, le plus prude, bref, le moins bandant qui puisse exister. Comprenant pas moins de cinq scènes de baise ne durant pas plus de deux minutes chacune (pour un film d’une heure cinquante, je vous laisse faire le calcul), il s’agit probablement d’une des œuvres les plus avares en la matière. Filmées à la façon d’une pub pour Carte Noire suivi d’un réveil façon pub pour Ricoré, ces scènes sont tellement auto-censurées qu’il parait hallucinant de se dire qu’une production comme celle-ci finisse par débarquer sur les écrans alors qu’elle comble du vide pendant la quasi totalité de sa durée uniquement pour ne pas avoir une interdiction trop forte, alors que le genre dans lequel elle désire s’inscrire est classé pour les adultes.
Je sais que ce paragraphe doit donner l’impression d’un espèce de frustré sexuel n’ayant pas eu sa dose nécessaire de paires de fesses à l’écran. Ce n’est pas vraiment le cas. C’est juste l’impression de s’être fait rouler complètement par une production mensongère. C’est exactement comme si John Woo avait tourné Hard Boiled en coupant ses scènes d’actions au bout de deux minutes et en montrant Chow Yun Fat assis sur son bureau à attendre que l’histoire avance. C’est comme un Star Wars sans Jedi, c’est comme un Star Trek sans Mr Spock, c’est comme Indiana Jones sans son fouet. Au bout d’un moment, il faut appeler un chat un chat : ce n’est pas un film érotique. C’est juste un drame avec quelques petites scènes légèrement osées. Mais quand ce même drame ne cherche même pas à faire le minimum pour essayer de raconter quelque chose à son spectateur, c’est juste les boules.
Bref : ce film est une purge. Une belle, une vraie. Pas de ces gentilles purges ou l’on se dit en sortant qu’il y avait pourtant matière à faire quelque chose de bien. Cinquante nuances plus sombres fait parti de cette catégorie de purges qui vous foutent en rogne en sortant de la salle, qui vous laisse avec un sale gout dans la gorge. « Oh non, ne me mets pas ça dans le derrière », dit Anastasia lors d’un magnifique travelling avant sur Christian Grey tenant dans sa main des boules de Geisha. En plus de répondre à une question que l’on était beaucoup à se poser après avoir vu le premier film (Anastasia est-elle tout simplement une jeune femme extrêmement naïve ? Non, elle est tout simplement con), cette phrase tiendrait presque d’une mise en abîme du spectateur devant le film. Et je peux vous assurer que même plusieurs jours après le visionnage, le spectateur n’a toujours pas fini de le sentir passer…
Claude S.
Note du rédacteur: 0/5 (Autodafé)
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