Premier long du réalisateur malais Dain Said, Dukun est aussi son dernier en date à être sorti. Ce film achevé en 2006 a subi moult remontages et s’est systématiquement heurté à la censure malaisienne qui refusait de le laisser paraître jusqu’à cette année. Ce qui bloquait le film l’année dernière encore a été accepté aujourd’hui, à la plus grande surprise de son metteur en scène, qui a vu son film validé après un coup de fil providentiel.
La raison de cette censure est très simple : le film s’attaque à un sujet sensible en Malaisie, en s’autorisant quelques libertés. Il évoque l’histoire vraie d’un « accident » lors d’un rituel shamanique, où un homme politique renommé du pays s’est retrouvé décapité par une ex-star de la chanson locale s’étant plongée dans la magie noire. Le film nous fait part du procès de cette femme, avec en parallèle son avocat qui enquête quant à la disparition de sa propre fille. Un vaste programme s’étalant sur quelques 110 minutes et mettant la patience du spectateur à rude épreuve. Bien que tourné il y a un peu plus de 10 ans, le film souffre d’une esthétique et d’une mise en scène datée, pleine de gimmicks d’un autre âge, qui peuvent donner à penser que la péloche sort tout droit des années 90. Les quelques scènes de fantastique nous laissent à voir notre sorcière enfermée dans une cellule très sombre, se désarticuler façon Ring de bas étage, les pieds en avant, le corps en arrière, gesticulant comme si les membres ne répondaient pas du même cerveau. Quelques secondes suffisent à notre œil pour remarquer que, dans la pénombre, se cache un acteur qui gigote les jambes, tandis que notre sorcière agite les bras. Une maladresse présente tout au long du film et qui décuple exponentiellement la sensation d’amateurisme du tout.

Mais du coup, je me sens assez légitime pour dire que la direction des acteurs est à côté de la plaque, ça sur-joue, ça se pavane, ça tombe régulièrement dans le grotesque. Côté mise-en-scène, je l’évoquais plus haut, c’est extrêmement faible, c’est daté, paresseux, austère, inoffensif. L’écriture est bavarde, insipide, creuse, prévisible. La lumière est plate et le montage indolent (il a certainement souffert de la censure, mais à quel point ?). Bref, le film est antipathique. Une belle accumulation d’adjectifs qui caractérisent une péloche aussitôt vue, aussitôt oubliée, avec quand même cette sensation désagréable d’engourdissement et d’ennui à chaque fois que je tombe sur un screen du film. Comme un membre amputé qui se rappelle à nous de temps à autre. Se procurer Dukun tiendra certainement du parcours du combattant, mais je laisse les plus curieux d’entre-vous tenter l’aventure, mais vous ne pourrez pas dire que vous n’aviez pas été prévenus. Pour le reste, je me décharge de toute responsabilité quant à votre soirée ciné avec madame ou monsieur, qui tombera à l’eau lorsque l’une ou l’autre s’écroulera dans le canapé en ronflant à réveiller les morts. Je ne dis pas ça pour rien, le camarade BenJ-B s’est endormi à côté de moi lors de la projection du film, et deux autres types faisaient rire la salle entière en ronflant la gueule grande ouverte devant un merdier qui ne restera pas dans les annales. Bref, encore un grand film à l’Étrange Festival 2018.
Jérémie N.
Note du rédacteur : 1/5 (Navet)
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