mardi 7 mars 2017

T2 Trainspotting, de Danny Boyle

En 1996, Danny Boyle avait réussi à se faire un nom avec son deuxième film, le désormais culte Trainspotting. Oeuvre citée encore comme une référence par un très grand nombre de critiques, mais aussi encore apprécié du grand public, il est assez surprenant de s’apercevoir qu’il ne s’agit que d’un film cynique, jamais subversif, faussement transgressif et à la provocation inoffensive mettant en avant son imagerie trash, lui permettant donc de faire illusion auprès du public. Ainsi, au lieu d’avoir le film choc annoncé, on avait uniquement une provocation facile de pré-pubère à base de bébé mort et de lancé de merde, mais qui ne s’intégrait jamais vraiment dans le récit. Ainsi, le choc n’était jamais vraiment présent, et on se retrouvait avec un film qui montrait de haut ses personnages ouvertement cons, dont la mise à distance dans la réalisation et la bêtise de ses protagonistes était censée amener du fun qui masquerait au passage le vrai manque de propos et de profondeur de l’œuvre. Il est par ailleurs assez hallucinant de revoir la dernière scène du film, avec Ewan McGregor avançant vers la caméra, un sourire se dessinant petit à petit tandis que sa voix nous expliquait en off qu’il allait devenir quelqu’un de « normal ». Cette dernière phrase, très ouverte au niveau du sens, était une dernière manière de se mettre dans la poche un public ne cherchant qu’à se faire caresser dans le sens du poil, en appuyant le point de vue du spectateur sur l’héroïnomane et le rapport qu’il a à la société, et ce quel que soit le point de vue de ce même spectateur. C’est dire si j’attendais avec impatience cette suite tardive qu’est T2 Trainspotting 2, d’autant plus que celle-ci ne semblait s’inscrire uniquement dans la lignée de toutes ses suites qui arrivent sur nos écrans 20 ou 30 ans plus tard sans qu’il n’y ait un véritable intérêt…

20 ans après les évènements du premier film, Mark Rent s’avère être pris de remords vis-à-vis de ses anciens amis, Spud et Sick Boy. Ainsi, il décide de retourner à Edimbourg se faire pardonner sa trahison. Mais ce que Rent ne sait pas, c’est que Begbie, 4ème membre de la bande et psychopathe en puissance, vient de s’échapper de prison…
La première chose qui frappe au visionnage de Trainspotting 2, c’est tout simplement l’absence de véritable récit. De la première à la dernière scène, on a le sentiment que le film ne sait pas vraiment quoi raconter : probablement parce que Trainspotting premier du nom avait malgré tout pour vocation de nous parler d’une génération et de son mode de vie. Ici, au lieu de nous parler de la manière dont cette génération a pu vieillir, le scénariste a choisi de parler des souvenirs de la jeunesse des protagonistes. Manière d’évoquer à nouveau certains aspect de cette génération qui n’avaient pas été évoqués dans le premier film ? Non. Ici, il ne s’agit que de profiter de la nostalgie du fan, lui évoquant constamment des scènes du premier film (quand il ne s’agit pas tout simplement de mettre directement des plans issus de Trainspotting premier du nom), et donc de faire du fan service pendant une grande partie du film. On notera par ailleurs que l’un des buts du premier film était malgré tout de choquer son spectateur. Il est donc on ne peut plus contradictoire de chercher à faire plaisir à son spectateur en faisant la suite de ce film, surtout lorsque le plaisir est censé être amené par l’évocation du premier opus.

Mais hélas, le scénario n’est pas la seule source d’énervement. Ici, c’est la première fois depuis longtemps que l’on peut avoir le sentiment que Danny Boyle ne sait pas comment filmer son histoire. Constamment à la recherche de formes nouvelles pour ses films, Boyle avait été, ces dernières années, particulièrement inventif quant à la manière de filmer et découper ses films. Que cela soit avec Trance et Sunshine, cette forme s’avérait extrêmement jouissive et lui permettait de faire du très bon divertissement, quand celle-ci n’est pas à la limite de l’expérimentale avec son excellent 28 jours plus tard. On était donc en droit d’attendre de Boyle une mise en scène efficace, vu la qualité de ses dernières œuvres. Hélas, il n’en est rien. Il s’agit clairement de son œuvre la plus faible de ce point de vue, tant cette mise en scène s’avère clipesque, et disons le clairement: forcée. On a le sentiment qu’ici, Boyle ne cherche pas à filmer de manière cohérente son film, mais tout simplement de donner la forme que l’on attend d’un de ses films. Ainsi, chaque cadre de travers, chaque mouvement de caméra improbable, chaque effet de style peine à vraiment s’intégrer, et plombent finalement le rythme que Boyle essaie d’insuffler à son film… 

Que dire d’autre ? Pas grand chose… Il n’y a pas grand chose à dire sur ce film, malheureusement… C’est clairement raté, mais il y a un tel manque d’ambition qu’il est en même temps compliqué d’imaginer comment ce film aurait pu être une réussite. Jamais intéressant, jamais intelligent, jamais choquant, jamais drôle, Trainspotting 2 s’inscrit donc dans cette lignée de films que je citais plus haut qui s’évertuent à continuer de cultiver un culte autour d’anciens succès. Mais en essayant de le mettre en même temps dans l’air du temps, cela ne fait que rendre cette suite complètement inutile (si on considère que le premier avait un interêt, bien sûr) et anecdotique. Il faut juste espérer que Boyle ne continue pas dans ce style et revienne à des œuvres plus pertinentes et réellement inventives, comme lui seul peut avoir par moment le secret.


Claude S.


Note du rédacteur: 1/5 (Navet)

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