lundi 20 février 2017

A Cure for Life, de Gore Verbinski



On peut dire sans hésitation que s'il y a bien un film qui intriguait en ce mois de février, c’est bel et bien A Cure For Life (ou devrait t-on plutôt dire A Cure For Wellness, titre original du film). Réalisé par le cinéaste Gore Verbinski, dont l’œuvre la plus célèbre à ce jour reste très certainement la trilogie Pirates des Caraïbes, il était très difficile d’imaginer ce que ce réalisateur était en train de nous préparer réellement. En effet, Verbinski étant à la fois un cinéaste doué, doté d’un sens visuel évident et d’une maitrise technique indéniable, et étant aussi un véritable technicien à la solde des studios, capable de réaliser sans véritable ambition des produits sans intérêt en se pliant à leurs exigences, chacun de ses projets intriguent tout autant qu’ils font peur. Ainsi, malgré les surprises que pouvaient être le premier Pirates des Caraïbes ou son remake de Ring, jusqu’à son génial film d’animation Rango (qui reste à ce jour son meilleur film), il avait aussi fallu se taper des films aussi insipides que les deuxième et troisième opus de Pirates des Caraïbes, ainsi que son complètement foireux Lone Ranger. Mais voir ce metteur en scène revenir à un projet plus risqué sans apparente garantie commerciale attirait les curiosités. Qu'en est-il donc du résultat ?

Racontant comment un jeune cadre du nom de Lockhart est envoyé dans les Alpes Suisses suite à une faute professionnelle, celui-ci devra aller chercher son patron dans une étrange clinique médicale après que celui-ci ait envoyé une mystérieuse lettre en précisant qu’il n’en reviendrait pas. Mais une fois là-bas, Lockhart se retrouve à son tour pris au piège du personnel médical, ne lui restant plus qu’à déchiffrer tout le mystère autour de ce lieu et les activités qui s’y passent pour espérer réussir à s’enfuir. Drôle d’objet qu’est A Cure For Life. Il est très difficile de ne pas être intrigué par l’apparente grossièreté du traitement scénaristique. Œuvre au manichéisme assumé dans laquelle on identifie ouvertement sans aucune difficulté les gentils et les méchants, œuvre au récit se jouant de mystères et de fausses pistes au point de limite sombrer dans le ridicule, on est légitimement en droit de se demander quel est réellement le sens de tout ce qui se déroule devant nos yeux, tellement le sentiment de ne pas savoir ou le film cherche à nous emmener est présent. On serait même en droit d’être agacé à force de séquences ne cherchant pas tant que ça à nous amener quelque part, provoquant évidemment l’effet inverse de celui que l’on recherche face à un film du genre : on a véritablement le sentiment de se faire balader par le scénariste. Mais c’est étonnamment tout le contraire qui se passe, et tous ces différents éléments sont les vecteurs procurant un vrai plaisir au visionnage de l’œuvre.

En effet, A Cure For Life procure un vrai plaisir de cinéma. Non seulement grâce à l’incroyable maitrise technique de Verbinski, offrant une mise en scène ne se relâchant jamais, belle et inspirée par instant, et donc, constamment jouissive. Mais ce qui ressort surtout de l’œuvre, c’est le sentiment d’avoir assisté à un film presque à l’ancienne, se permettant scénaristiquement une structure et des personnages comme on n’oserait presque plus en faire. Ainsi, oui : le méchant s’identifie dès sa première apparition, et on n’est évidemment pas surpris lorsque l’on nous montre ouvertement sa réelle cruauté. Mais en assumant cet aspect du film accompagné d’une mise en scène maitrisée, Gore Verbinski provoque chez le spectateur le plaisir d’être en terrain connu face à une œuvre connaisseuse et respectueuse d’une certaine histoire du cinéma, et lui permettant de pouvoir assister à nouveau à ce genre de film sur grand écran. Idem pour la narration citée plus haut : en assumant de constamment bousculer le spectateur par des retournements de situation contredisant tout ce qui a été dit au spectateur dans les minutes qui précédaient, Verbinski réussi à fasciner le spectateur avec son lieu et tout le mystère qui entoure cette étrange cure, filmée depuis le début comme la véritable menace du film. Et disons le : Verbinski réussi finalement là ou Martin Scorsese avait malheureusement échoué avec son ambitieux Shutter Island, dont les ambitions cinématographiques n’étaient pourtant pas si éloignées. Alors oui, on est en droit de pinailler pour une durée un peu excessive (le film fait pas loin de 2h25) et il aurait été clairement bénéfique de couper certains passages histoire d’être sûr de ne jamais perdre en route le spectateur. Mais à une époque ou la grande mode pour les films de divertissement consiste à enchainer les retournements de situation et les climax dignes de séries télés sans jamais essayer de s’intéresser une minute aux personnages ni à l’intrigue, et généralement filmé platement et sans imagination, voir un vrai film de cinéma jouer sur un principe similaire, mais en ayant compris ce qui permet à ce genre de narration de fonctionner, ça vaut le coup d’être vu. De là à dire que A Cure For Life marquera les mémoires : probablement que non. Mais bouder son plaisir serait vraiment dommage pour le coup…




Claude S.


Note du rédacteur: 3,5/5 (Bon)

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