mardi 31 janvier 2017

Podcast d'AlternaBis #1 - Janvier 2017

Premier podcast d'AlternaBis.

https://www.youtube.com/watch?v=mzP-7m03G6w


Participants :

Ferdinand Bardamu
Claude S.
Antoine T.


Sujets :

1:35 : 31, de Rob Zombie
19:07 : Assassin's Creed, de Justin Kurzel
31:47 : Kill the King, de Eddie O'Keefe
38:36 : Kill Me Three Times, de Kriv Stenders
47:28 : Nocturnal Animals, de Tom Ford
1:09:00 : Quelques minutes après minuit, de Juan Antonio Bayona
1:30:15 : The Birth of a Nation, de Nate Parker James
1:49:22 : La mécanique de l’ombre, de Thomas Kruithof
2:01:44 : La grande muraille, de Zhang Yimou
2:10:23 : xXx : Reactivated, de D.J. Caruso


2:18:35 : Live by Night, de Ben Affleck

2:31:31 : Nitro Rush, d’Alain Desrochers

2:34:17 : Valley of Stars, de Mani Haghighi

2:45:43 : Resident Evil : Chapitre final, de Paul W.S. Anderson

3:05:55 : Au prix du sang, de Roland Joffé

3:11:44 : The Last Face, de Sean Penn

3:27:57 : La La Land, de Damien Chazelle

3:38:34 : Top/Flop cinéma du mois

3:39:41 : Grave, de Julia Ducournau

3:51:45 : Guillaume Lemans, scénariste

4:01:04 : Loin des hommes, de Fred Scotland (série)

4:02:30 : Your Name, de Makoto Shinkai

4:08:53 : Attentes pour février

Au prix du sang, de Roland Joffé

Semaine difficile pour le genre. Valley of Stars, Resident Evil : Chapitre final, et Au prix du sang (There Be Dragons en VO, titre sans queue ni tête compte tenu de ce que nous raconte le film). Ça pose déjà une certaine ambiance. Ce film a connu la trajectoire typique d’une réalisation Roland Joffé. J’entends par là qu’il s’agit d’un film à tendances schizophréniques et qui a l’horripilant défaut de ne pas s’assumer. En effet, tourné comme une biographie partielle de Josémaria Escriva, le fondateur de l’Opus Dei, et prenant place en pleine guerre civile espagnole, le film connait un échec critique et public retentissant lors de sa sortie en 2011, l’exploitation salle s’étant cantonnée à l’Espagne (le film y a été tourné, et les fonds sont majoritairement espagnols). Dès lors, que ferait un bon Roland Joffé qui se respecte ? Il retournerait en salle de montage pour livrer une deuxième version de son film en niant complètement le montage original ? Tout à fait !



Malaxeriez-vous un bon crottin qui a un sale aspect pour essayer de l’embellir ? Non ? Moi non plus. Roland Joffé, si. En résulte un film qui n’a absolument plus aucun sens, puisque nous sommes censés suivre les trajectoires imbriquées et liées de deux amis d’enfance, à savoir celles du prêtre Josémaria et de Manolo, un fasciste infiltré chez les communistes. L'histoire nous est racontée à travers les souvenirs de Manolo, qu'il délivre à son fils souhaitant écrire un bouquin sur le fameux curé. Ce parti pris de suivre ces deux amis nous est exposé dès le premier carton du film. Bien sûr, ce choix ne dépassera pas le stade du carton. Le film sera donc un montage parallèle entre notre curé tâchant de rejoindre l’Andorre pour ne pas se faire fusiller par les fascistes qui défouraillent du prêtre à tire-larigot, et notre facho qui tentera de sauter une communiste éprise du meneur de la révolution.

Mais quel est le problème ? Tout simplement que Joffé nous fait du Seth Rogen sans le vouloir. Tout est grotesque sans être assumé. Tout est souvent gênant. Après une séquence de rencontre entre Manolo et l’élue de son coeur, à coups de champs-contrechamps les yeux dans les yeux et de malaise à tomber la tête la première dans un bac de fruits (il tombe dans les pommes, vous comprenez…), voici un exemple d’un échange magistral entre Wes Bentley (Manolo l’facho) et Olga Kurylenko (la communiste nympho) :


Manolo l’facho : « Pourquoi tu couches avec tous les camarades ? »

La communiste nympho : « Parce que c’est peut-être leur dernier jour sur Terre. Je leur dois bien ça.»

Manolo l’facho : « Et pourquoi moi j’ai pas le droit ? » (le mec n’a peur de rien)

La communiste facho : « Parce que tu es jaloux ».




Fallait oser.

Quand une jeune femme propose au curé de le loger et de le mettre à l'abris, le curé la regarde lubriquement en lui sortant : "Je ne peux pas accepter. Je suis un prêtre, mais je suis aussi une homme...".
Quand Joffé filme une séquence dans un hospice pour malades mentaux, il demande à ses figurants de marcher dans les couloirs en se tapant la tête avec des noix de coco. Quand Joffé filme le curé implorer Dieu et pleurer à cause de son silence, il fait apparaître des larmes sur une statue de la vierge. Quand Joffé filme un type en train d’aller pisser, il l’accompagne d’envolées orchestrales et lyriques pour souligner combien c’est épique. N’importe quel mot, n’importe quelle phrase, n’importe quel geste est accompagné d’envolées orchestrales. En fait, je suis assez catastrophé. Ce film est une sortie technique, certes, mais c’est une bondieuserie si nanardesque qu’il comblera aisément certaines après-midi du directeur de programmation de NT1. Rien ne tient debout. Je cherche vraiment à trouver des contres-arguments, à peser le bon et le mauvais pour sortir une critique qui ne soit pas qu’un couperet, mais putain, je ne peux pas. Même les synthés qui apparaissent pour situer temporellement l’action sont dégueulasses. Une vieille typo Avid grisâtre et toute ombrée que Michel Drucker ne laisserait pas passer.

Au prix du sang, c’est la désolation absolue. J’ai vraiment du mal à comprendre l’acharnement de ce mec qui tient véritablement à nous sortir moult versions de films intrinsèquement ratés. Il doit quand même en être conscient, bordel ! J’ai bien refait le film dans ma caboche jusqu’à l’épilogue, et je ne retire pas une séquence qui vaille le coup d’œil, pas une idée. C’est une honte ce putain de film. C’est grossier et grotesque, ça passe complètement à côté de son sujet (évidemment, puisque ce n'est plus son sujet, remontage total oblige), y a aucune subtilité, l’acting est digne d’un téléfilm allemand des années 80, c’est la gerbe d’un grabataire qui arrive avec un sachet sous ton nez pour te la faire partager. « Je suis colère », comme dirait Thomas VDB dans Lazy Company. Sur ce, je m’en vais revoir Balada Triste, vrai putain de film sur la guerre civile espagnole, pas un truc qui est incapable de se positionner et de livrer un récit ne serait-ce qu’à moitié cohérent. Et si vous voulez définitivement l'achever en mode coup de grâce de toréador (on est en Espagne merde) : Même La croix n'a pas apprécié le film.

 




Ferdinand Bardamu
Note du rédacteur : 0,5/5 (Honteux)

lundi 30 janvier 2017

Resident Evil : Chapitre Final, de Paul W.S. Anderson

Resident Evil
Resident Evil : Apocalypse
Resident Evil : Extinction
Resident Evil : Afterlife
Resident Evil Retribution
Resident Evil : Chapitre Final
Bientôt Resident Evil : 4ème page de couverture ? 

Cette saga, adaptée d’une autre grande saga du jeu-vidéo, a débuté en 2002 sous l’œil avisé de Paul W.S. Anderson, grand réalisateur de Mortal Kombat, Alien VS Predator ou encore des Trois Mousquetaires. 3D. Parce qu’on déconne pas avec le cinéma chez Paulo. Puis elle a continué sous les commandes d’Alexander Witt (un mec dont le nom est en rouge sur wikipedia) pour Apocalypse et de Russell Mulcahy (Highlander, et surtout le mec viré pour divergences artistiques sur Rambo 3) pour Extinction. Puis après papa Anderson il est revenu, puisque ce serait con de pas conclure son œuvre non ? Donc il a fait 3 films. Dont celui-là. Ah oui, et il est marié avec Milla Jovovich, c’est important de le préciser parce que bon, on a du mal à voir pour quel autre folie que l'amour il le ferait. Bon, y a bien la thune...

Et ben Alice elle se fait trahir par Wesker (le mec qui est méchant depuis le jeu sorti en 1996, donc bon c’était prévisible quoi), et elle doit retourner là où tout a commencé à Raccoon City (sérieux la ville existe encore et toujours quoi, en mode Astérix et Obélix) parce que les méchants corporate de chez Umbrella ils veulent baiser les survivants (fin les tuer pendant des séquences super découpées).
Ah oui, elle a plus ses pouvoirs, donc elle va galérer.

Resident Evil… Pour être franc, ça a toujours été une sorte de pêché mignon. L’espèce de grosse bouse qu’on ne peut s’empêcher de regarder chaque fois que ça sort, parce qu’on a envie de voir comment ça va se terminer. Et ben non seulement ils auront déféqué sur les fans de le saga vidéoludique depuis le 2ème épisode, mais en plus ils finissent en coulant un immense 
bronze (je remercie synonymo.fr qui me permet de trouver pleins de trucs pour éviter de dire
« caca » de façon vulgos) dans le visage marqué par la honte (on prend 10 ans à chaque film) des spectateurs, ne daignant pas un seul instant clore « l’histoire » qu’ils ont tenté de mettre en place en 7 films. Cependant, on applaudira une performance scénaristique : on aura rarement vu autant de deus ex machina dans un film de mémoire récente. Des clones, des clones, des clones, des fois même des clones, et des grenades dans le cul à un moment où tout semble perdu (véridique), Paul W.S. Anderson n’est ici que pour filmer sa belle et se faire payer son sachet de cocaïne par une boite de prod qui ne s’amuse qu’à compter les billets qu’elle extorquera aux gens qui aiment dire qu’ils veulent juste « déposer » leur cerveau. Si seulement ils savaient que l’AVC les attend.

Fais le 15 bro', déconne pas


C’est laid. Tout est laid. Les SFX sont laids. Les cascades sont laides. C'est tellement mal filmé qu’on ne peut qu’avoir un pincement de cœur en pensant à la cascadeuse qui a fini sans bras ni jambes pendant le tournage (Et en plus ça aurait pu faire un putain de zombie sans coûter cher au département make-up.). Le montage est tellement épileptique qu’on se prend à vérifier que nos yeux ne se mettent pas à saigner. Le son vous fera regretter Nickleback

                                                                                                                                         On l'appelle l'ovni




Bref, c’est pas difficile de parler de ce film, c’est de la merde. C'est quand même super inquiétant de voir que Paul W.S. Anderson ne progresse pas, reste cantonné à faire des films comme s'il était un gosse à qui on filerait 200 millions de dollars. Surtout que le mec doit réaliser (et écrire sinon c'est pas marrant) l'adaptation de Monster Hunter, avec Milla Jovovachemanmieuksa dans le rôle titre. À l'aide.

"-Regarde chérie, notre compte courant est dans le vert"!

Antoine T.


Note du rédacteur : 0,5/5 (Honteux)
Note de l'équipe : 1/5 (2 notes)

samedi 28 janvier 2017

Valley of Stars, de Mani Haghighi

Drôle de film que ce Valley of Stars. Sixième film réalisé par Mani Haghighi, mais le premier à sortir en France, que cela soit en salle ou en Direct-To-DVD, celui-ci s’avère être une sorte de polar sans en être véritablement un, une œuvre fantastique sans jamais vraiment mettre en avant ses éléments surnaturels. Valley of Stars raconte l’histoire d’un inspecteur envoyé par la police secrète sur l’île de Qeshm pour enquêter sur un suicide suspect. Accompagné par un ingénieur du son et un géologue, le policier va se rendre compte que bien des mystères entourent cette mort, autant que le lieu dans lequel il s’est apparemment suicidé : une carcasse de bateau échoué en plein milieu d’un cimetière.


La première heure du film intrigue réellement : passant sans complexe d’une mise en scène purement cinématographique à des moments documentaires, le film assume cette transition radicale entre deux formes différentes de cinéma. Ainsi, la surprise provoquée par cette forme  « réaliste » dans une œuvre fantastique a de quoi désorienter, d’autant plus que celle-ci arrive après un premier élément pouvant apparaitre comme fantastique. La mise en scène, tantôt proche d’un film d’auteur, tantôt proche d’un pur film de genre, réserve elle aussi son petit lot de surprises tant celle-ci parait instable, et ce malgré son inégalité (par moment très intelligente, par moment plus discutable quant à sa pertinence). C’est donc avec un réel intérêt que l’on regarde le film pendant sa première partie, malgré le fait que l’on n’arrive pas vraiment à cerner l’intention du réalisateur, et donc, où le film souhaite véritablement en venir.

Le problème, c’est que justement, Valley of Stars ne va nulle part. Dénué de tout véritable propos et de toute forme de cohérence cinématographique, Valley of Stars fini presque par ennuyer dans sa deuxième partie. En ne cherchant à faire qu’uniquement un film d’atmosphère, Haghighi oublie d’emmener ses personnages vers une véritable évolution, et ne sait finalement plus comment vraiment filmer cette histoire. Il n’est même pas si surprenant que cela de voir que le réalisateur finit par littéralement se regarder filmer, prendre la pose « histoire de », pour tenter de combler les trous de son film. Et il est même encore moins surprenant de voir la dernière partie du film tomber dans tous les travers inhérents à ce genre de récit, au point d’être dans l’incapacité de réellement le conclure avec un final cohérent, d’où une fin ouverte n’amenant vers aucune forme de questionnement. Ce qui est pourtant le principe même de ce genre de fin…



Au final, que peut-on vraiment dire sur ce Valley of Stars ? Pas grand chose. Intriguant pendant un temps, puis lassant sur le reste, le film de Haghighi sonne finalement creux, et s’impose uniquement comme un exercice de style pas mauvais en soi, mais complètement vain qui ne marquera pas les mémoires. Il n’en reste que face aux navets qui sortent cette semaine, Valley of Stars a le mérite de proposer par moments certaines idées intéressantes, et un petit lot de beaux plans. Parce qu’à côté, je peux vous assurer que c’est pas Resident Evil qui va vous surprendre…




Claude S.

Note du rédacteur: 2/5 (Faible)
Note de l'équipe : 1,5/5 (2 notes)

vendredi 27 janvier 2017

Nitro Rush, d'Alain Desrochers

Nitro Rush est un film québecois réalisé par Alain Desrochers, sorti en DTV dans nos contrées.
Nitro Rush est la suite du film Nitro, pas sorti dans nos contrées en 2007.
Nitro Rush est aussi et surtout un très mauvais film.

Max est en prison depuis 6 ans. Il est tout colère. Et en plus, il apprend que son fiston, c’est un super méchant criminel de l’internet qui est dans des mauvais bails, genre le mec il veut faire de la drogue de ouf. Mais Max, il va pas laisser faire, c’est un mec qui a des valeurs, genre les Lopez du 36. Donc il s’évade et il va montrer qu’on joue pas avec la famille.

Voilà pour le pitch qui ferait rugir de jalousie notre bon Luc Besson. En 1999.

Le cinéma québécois, pour peu qu’on aille au-delà de M. Dolan, est un cinéma particulièrement intéressant. Il est difficile d’échapper à un quelconque message politique qui sait rester discret, et on y trouve de très belles pépites. La comédie québécoise a de cela intéressant qu’elle se rapproche plus du cinéma indépendant américain que de la comédie franchouillarde dont la seule chose intéressante en 2017 est son cynisme assumé. Le drame québécois est particulièrement intéressant, que l’on parte du biopic avec le Dédé, à travers les brumes revenant sur une partie de la vie du très grand André « Dédé » Fortin, chanteur du groupe Les Colocs, ou bien du drame familial C.R.A.Z.Y. de Jean-Marc Vallée. Le Québec est aussi le pays du désormais inévitable Denis Villeneuve. Ils se sont illustrés dans le film de genre avec le sympathique Turbo Kid et les très bons St-Martyr-des-Damnés ou Sur le seuil.

Nitro Rush ne donne pas une bonne image de ce cinéma.

Nitro Rush a le même problème que la plupart des films de genre : il veut faire comme les voisins cool d’à côté qui sortent du Fast & Furious 7 et autres films d’action qui sont juste là pour plaire aux adeptes du « Wah c’est con mais ça fait du bien ». Sauf que ça, ça marche quand on a 200M de dollars de budget (minimum). Quand on n’a pas autant de thunes, on fait quoi ? Quelques scènes d’action (parce qu’il faut bien) qui sont pour le coup efficace (chapeau bas au metteur-en-scène et aux cascadeurs), mais sinon on ne compte que sur des dialogues et des petites scènes d'actions nazes et d’un vide abyssal, ainsi que sur une intrigue dans laquelle on se retrouve obliger de suivre l'histoire de Roger du bar à 3h du matin, du jour où il a vu des mecs louches en bas de chez lui qu'étaient pas comme nous tout en affrontant une terrible envie de pisser et d'arrêter le massacre. C'est sûr, quand on a une explosion tous les 3 plans, ça nous fait oublier qu’il vient d’aller voir la tombe de son ex-femme avec une masse à la main en pleurant. Par contre, quand il faut se taper 30 minutes de blabla insignifiant, ça devient dur.

Voilà. Pas grand chose à dire. C’est pas top, ça servira pour la bande-démo des cascadeurs et du réa qui doit rêver d’Hollywood, mais en tout cas ça servira pas le film de genre québécois.
Quand on comprendra que le cinéma de genre n’est pas l’exclusivité des américains, et que l’intérêt est de se servir de la culture de son propre pays pour se différencier, et enfin qu’un étron à 200M de dollars ça se transformera juste en diarrhée avec 2M de dollars, peut-être qu’on avancera.

D’ici là, on va se mater Nitro Rush, et se rassurer sur le fait qu’on n’est pas les seuls à faire de la merde.


Ps: C'est pas non plus filmé avec les pieds, on est mieux que sur "The Last Face", ça fait le job, les acteurs y croient, les cascades sont  mais c'est juste con et ça plaira aux amateurs de nanar.






L'équipe du film a des valeurs.











Antoine T.
Note du rédacteur : 2/5 (Faible)

mercredi 25 janvier 2017

Live by Night, de Ben Affleck

Quatrième long de Ben Affleck, Live by Night intrigue déjà par son casting en forme de Rolls-Royce ainsi que par le thème abordé, très Michael Mann dans l’âme. Pas étonnant d’y retrouver William Goldenberg au montage, déjà présent derrière les stations de Heat et Miami Vice : Deux flics à Miami

Le pitch est en apparence assez simple : Une petite frappe de Boston quitte la ville après être passée à deux doigts de la mort lorsqu'un mafieux local a compris qu’il entretenait une relation avec sa maîtresse. Pour se venger, il décide de faire tomber ledit mafieux en s’associant avec son rival, un italien qui l’envoi conquérir le marché du rhum en Floride.

Un exercice somme toute périlleux pour Ben Affleck qui, comme pour The Town et Argo, occupe le premier rôle devant la caméra tout en s’attachant à la réalisation. Si le film est plastiquement superbe, il serait de bon ton de laisser cette double casquette d'acteur/réalisateur au placard sur le prochain effort, pour se consacrer davantage à la mise en boîte et éviter les problèmes de rythme qui représentent la tare majeure du film. Si la construction de l’ensemble est formellement cohérente, le film pâti d’un manque de liant et d’alchimie qui étirent des propos et des séquences sans réel besoin, hachant de ce fait la fluidité d’une œuvre qui aurait gagné à se montrer plus naturelle et spontanée. Un problème d’autant plus frustrant qu’un constat parfois désagréable pointe le bout de son nez : Les séquences qu’on aurait voulu plus longues prennent fin prématurément, et les séquences plus anodines s’allongent sans nécessité. Quant au problème de jouer dans son propre film, il s'agit parfois d'un sentiment de prise de distance dans l’interprétation de son personnage, pas toujours habité comme il se devrait.

Il en va de même quant à la caractérisation un peu balourde de certains personnages qui, parce que trop marqués, perdent de leur importance et de leur impact. Je pense notamment à la caricature des membres du KKK ou au personnage pivot interprété par Elle Fanning. Un personnage qui devient trop soudainement et artificiellement le centre du film, avec pourtant quelques maigres minutes d’apparition à l’écran. C’est d’ailleurs elle qui sera le prétexte au climax, donnant vraiment l’impression d’un personnage faisant office de pont entre un point A et un point B, sans autre consistance que le besoin pour Affleck de lier deux évènements de son scénario. À côté de ça, il est intéressant de noter la gestion de sa mise en scène, empilant de manière peut-être scolaire mais surtout efficace les grandes notions du film de gangsters, esthétiquement et narrativement. Ben Affleck récite sa leçon et prouve qu’il comprend le cinéma, et qu’il est un artisan en devenir. Je ne serais pas étonné qu’il nous claque un film qui traversera le temps, qu’il suive le chemin d’un Clint Eastwood et devienne un auteur de cette importance. Avec Live by Night, non exempt des défauts évoqués ci-dessus, il parvient à toucher quelque chose du bout des doigts : la maîtrise. Rappelons quand même que nous avons affaire à un film d’un acteur de 44 balais qui a passé la majorité de sa carrière à jouer les belles-gueules pour midinettes. Live by Night sera peut-être un film mineur de sa filmographie, mais présage de très bonnes choses pour la suite.

La péloche ne dépoussière pas le genre, mais en livre une vision authentique et toute en sincérité, faisant montre du respect et de l’amour de Ben Affleck pour ce cinéma, et surtout, ne se foutant pas de la gueule du spectateur comme pouvaient le faire Michael Mann avec Public Enemies ou, plus récemment, Paul Thomas Anderson avec Inherent Vice (l’un se vautrant dans la paresse et l’autre dans la sophistication prétentieuse). Saluons au passage le travail du trop mésestimé Harry Gregson-Williams, qui livre une soundtrack aux petits oignons, qui ne tape jamais à côté de la plaque et qui sublime parfaitement les plans du chef-op Robert Richardson. La marque d'un bon réalisateur est aussi de savoir s'entourer de chefs de poste talentueux.

En allant voir Live by Night, vous ne verrez pas le film de l’année, c’est évident. Vous verrez par contre le film honnête d’un mec qui commence à faire son chemin, qui commence à maîtriser son cinéma après le sursaut d’Argo, et qui se place sans trop de mal sur la liste des réa’ à suivre pour ces prochaines années. Et ça, c’est enthousiasmant !





Ferdinand Bardamu


Note du rédacteur : 3/5 (Honnête)

dimanche 22 janvier 2017

xXx : Reactivated, de D.J. Caruso

Signé par Rob Cohen en 2002, xXx premier du nom s’était imposé comme un petit film d’action sans trop grande prétention, ni vraiment bon, ni vraiment mauvais. Son but affiché étant clairement d’imposer définitivement Vin Diesel comme une superstar du cinéma d’action après leur précédent succès, Fast and Furious. Le film avait pour intention d’être une sorte de mélange entre James Bond et la désormais célèbre saga qui avait participé à la renommée de son réalisateur et de sa star. On pouvait ainsi découvrir le personnage de Xander Cage, superstar des sports extrêmes et (gentil) bad boy, se faire recruter par Samuel L. Jackson pour devenir un agent secret de la NSA grâce à ses pratiques sportives. Après des péripéties aussi mouvementées que peu crédibles, celui-ci sauvait le monde en infiltrant un groupe terroriste en s’affichant avec ses grosses voitures, et en finissant par pécho Asia Argento au passage. Après un oubliable deuxième opus signé Lee Tamahori en 2005, ou le rappeur Ice Cube remplaçait Diesel, nous voici en 2017 paré pour un troisième opus, 15 ans après le premier. 


xXx Reactivated. Comme son nom l’indique plus ou moins, c’est le retour de Xander Cage. Après s’être exilé en se faisant passer pour mort, celui-ci accepte de travailler à nouveau comme agent auprès de la NSA après avoir appris la mort de Gibbons (Samuel L. Jackson), et va devoir bosser en infiltrant un groupe ayant volé une arme de destruction massive, la bien nommée "Boite de Pandore". Mais bien évidemment, tout va s’avérer plus compliqué que prévu, et Cage ne va pas devoir lutter uniquement contre ses apparents ennemis, mais aussi contre son gouvernement. Bref, on va pas se leurrer très longtemps. A l’heure ou vous lisez ces lignes vous devez tous vous douter que ce synopsis n’a absolument aucune importance. La première chose qui énerve lorsque l’on regarde xXx Reactivated, c’est son refus de toute forme de cohérence cinématographique. Passé la présentation des méchants, l’une des premières scènes du film nous présente Gibbons en train de recruter ce qui semble être une recrue pour la NSA. Cette recrue, c’est le footballeur brésilien Neymar. Présenté comme un joueur de foot particulièrement talentueux, la séquence nous gratifie d’un freeze sur l’image, suivi d’un panneau sur ce joueur indiquant « a cru être recruté pour les Avengers ». Ce panneau est symptomatique de l’un des plus gros problème du film. Au lieu d’essayer de nous faire croire à l’univers que le film va nous présenter, le choix assumé des scénaristes est de nous mettre constamment à distance du récit, et ce en deux points : faire de la mise en abîme sur la filmographie de ses acteurs, et malheureusement, ridiculiser constamment les personnages que l’on nous montre. Quel est l’intérêt de rappeler aux spectateurs que Jackson a interprété Nick Fury ? Aucun. On s’en moque complètement. Ici, Jackson interprète Gibbons. Pas Nick Fury. Pourquoi nous présenter un personnage en nous donnant l’impression d’avoir un abruti en face de nous ? Flatter les bas instinct du spectateur et lui donner toutes les cartes en main pour lui permettre d’être cynique à la vision du film. Passé cette séquence particulièrement désagréable, on se retrouve enfin face à xXx. On retrouve Xander Cage en action, tout ce qu’on attend en allant voir ce genre de film. Hélas, cette séquence complètement foireuse est à l’image du reste du film. Voulant se mettre dans la poche les fans de sports extrêmes après s’être mis dans la poche les cyniques, on a droit à une séquence de 10 minutes de démonstration d’acrobaties à ski dans la jungle et sur skateboard, avec bien évidemment Xander Cage poursuivi par la police histoire d’accentuer le fait que c’est un bad boy. Tellement bad boy que la conclusion de cette séquence, c’est que Xander Cage avait piqué un décodeur pour permettre à la population de regarder le foot à la télé. Au lieu d’assumer d’avoir un personnage qui puisse être réellement badass, il fallait bien évidemment présenter Vin Diesel comme un héros au grand coeur avant tout. Par ailleurs, il faudra pas être trop surpris d’entendre tous les personnages passer leur temps à vanter les mérites de Xander Cage, qui est apparemment le plus sexy, le plus badass, le plus gentil, le plus fort et le plus intelligent des êtres humains. Autant de qualités chez un même homme, c’est vraiment incroyable… Sauf que sachant Vin Diesel est à la production, on en viendrait plus à croire que ses compliments lui sont directement destinés, et non pas à son personnage.
S’ensuit la présentation des personnages secondaires caractérisés à la truelle, donc pour la faire courte, on a : la lesbienne protectrice des animaux, dégommeuse d’êtres humains au sniper et fan de Call Of Duty au passage histoire de faire jeune. On a également le cascadeur plus ou moins fou qui poste ses cascades sur Snapchat et qui s’avère être particulièrement con pendant tout le film. Et pour finir, un jeune DJ qui passe son temps à lever les bras en l’air en mettant de la dubstep de supermarché et qui selon les personnages du film « met le feu à chaque fois qu’il passe à un endroit ». A en juger la réaction des gens dans la salle, pas sur qu’il ai mit le feu le mec, vu le malaise qui s’instaurait à chaque fois qu’il apparaissait à l’écran. 


Filmé et monté au mépris du bon sens, la mise en scène de D.J. Caruso est une véritable catastrophe. Jamais celui-ci n’arrive à mettre véritablement en valeur ses scènes d’actions. En amenant des artistes martiaux comme Donnie Yen et Tony Jaa (que l’on avait pu voir dans une autre production avec Vin Diesel : Fast and Furious 7), la logique aurait voulu des plans plutôt larges, montrant au spectateur que ces deux là sont capable de faire eux mêmes leurs cascades d’un seul coup. Hélas, choix incompréhensible, Caruso décide de filmer son action majoritairement en gros plan, ce qui ruine bien évidemment le spectaculaire de la chose. Pire, les gros plans ne pouvant bien évidemment pas montrer l’entièreté de l’action, Caruso choisi un montage rapide, beaucoup trop en l’occurence, brouillant au passage la lisibilité de l’action. Les seules cascades filmées en plan un peu plus large sont celles effectuées par Xander Cage, mais en filmant majoritairement son action en plan GoPro fixe, on n’obtient bien évidemment jamais des scènes réellement cinématographiques, et donnent plus l’impression de voir les images d’archives d’une quelconque compétition sportive… Il est d’autant plus dommage de voir que Tyler Bates, le compositeur du film, semble être la seule personne à bord qui ait pris son rôle au sérieux, et réussi malgré tout à sortir des compositions musicales plutôt correcte. Mais malgré ses effort, jamais il ne peut à lui tout seul sauver l’entreprise. Par ailleurs, les fans de rap (dont je fais parti) seront plutôt contents d’entendre un morceau d'Ice Cube lors du générique de fin. C’est peu, mais après m’être tapé ce truc, cela a suffit à me redonner un petit sourire…


xXx Reactivated n’est pas une oeuvre de cinéma. xXx Reactivated n’a même pas la décence d’essayer de nous construire un récit. xXx Reactivated n’a même pas l’intention de nous offrir une mise en scène efficace. xXx Reactivated, c’est 1h47 de racolage de tout bord, essayant finalement de se mettre dans la poche un spectateur pas trop regardant, prêt à accepter n’importe quoi tant que ce n’importe quoi lui est servi sous des pseudos airs cool. Sauf qu’avec une budget de 85 millions de dollars, on est en droit d’attendre un peu plus qu’un faux film…







Claude S.


Note du rédacteur: 0,5/5 (Honteux)
Note de l'équipe : 0,5/5 (2 notes)

mercredi 18 janvier 2017

La grande muraille, de Zhang Yimou

Blockbuster sino-américain produit pour pas moins de 135 millions de dollars, La grande muraille est le dernier né d’un certain Zhang Yimou, cinéaste chinois ayant connu son heure de gloire dans les années 90 avec notamment deux drames de renom : Epouses et concubines et Vivre !.
 Laissant de côté ses tendances art et essai, voilà qu’il s’attaque au plus gros budget de l’histoire du cinéma chinois, après avoir été l’artisan d’un Flowers of War (Starring Christian Bale) produit en 2011 pour 94 millions de dollars. Un auteur qui parvient à gérer des plateaux aux finances si diamétralement opposées, forcément, ça intrigue. Surtout si l’auteur en question insuffle sa vision et son cinéma à ladite péloche.

Alors, qu’en est-il de ce joyeux bazar ? William Garin (Matt Damon) et Pero Tovar (Pedro Game of Thrones Pascal), en quête d’un redoutable explosif appelé « poudre noire », se retrouvent pourchassés par les locaux du territoire qu’ils traversent. Après avoir semés les malotrus et décimés une étrange créature, les voilà aux pieds de la grande muraille, accueillis par les flèches de ses gardes un brin hostiles qui les feront d’abord prisonniers. La première question taraudant nos deux compères n’est pas de savoir s’ils vont passer l’arme à gauche dans les heures qui viennent, mais plutôt qu’est-ce que cet énorme rempart tend à repousser ?

La Chine nous a habitué à ces grandes fresques opposant deux familles l’une à l’autre pour une conquête de territoire ou pour venger la mort d’un de leurs proches. Il est donc intéressant de voir se tourner la chose vers un fantastique assumé et débridé (!), dans tous les sens du terme : En délaissant les traditions thématiques propres au cinéma chinois, le film cherche avant tout à satisfaire le grand public occidental, faisant de Matt Damon l’incarnation du « Deus Ex Machina » made in USA. C’est alors que les craintes que nous avions pu formuler avant le visionnage du film commencent à faire surface et se préciseront au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue : La grande muraille est bel et bien insipide. Au-delà de son pourtour bis assez plaisant, la péloche revêt une forme de téléfilm qui chie des dollars mais post-produit à vitesse grand V, aux CGI parfois grossiers et toujours dans l’outrance, et au montage qui manque cruellement de lisibilité et de finesse. Ça fait un moment qu’on s’est lassé de ces ralentis esthétisants suivant une flèche transpercer la carcasse de sa cible, vous ne trouvez pas ?

Et comme la plupart des atours du film, la direction artistique est en dents de scie, oscillant entre les plans de pure bravoure (notamment en ce qui concerne les rythmiques tribales utilisées par les factions pour se passer les ordres, qui feraient presque penser à celles de Mad Max: Fury Road), à d’autres plus potaches qui lorgneraient plus du côté d’Hercule ou de Xena la guerrière. Les créatures, quant à elles, sont loin d'apporter l'hostilité et la crainte suscitées par celles de Starship Troopers, qui, en 1997, réussissait un bien meilleur coup dans la caractérisation de ses arachnides, aussi bien dans la forme que dans le fond. L’écriture, sans surprise aucune, ne dissimulera aucun mystère, et vous aurez cerné les tenant et aboutissant du scénario en quelques minutes à peine. Magie du cinéma oblige, 2% de la totalité de la muraille de Chine sont attaqués, et Matt Damon passait là par hasard. « Bah oui, sinon y aurait pas de film », diront certains; d’autres regretteront que la majorité de La grande muraille tienne à ces circonstances hasardeuses et tellement téléphonées qu’on serait tenté de jouer au jeu de la prophétisation d’une scène à l’autre. Ajoutons à cela la présence d’un Willem Dafoe qui n’a pour seul objectif que de ramener un nom connu à l’écran, et on serait tenté d’envoyer le film aux oubliettes manu militari. Le casting un peu ronflant n’étant d’ailleurs que trop rarement sublimé.

Ne nous fourvoyons pas, le film sera effectivement oublié dans quelques mois. Pourtant, il évite l’écueil de la catastrophe, et propose un divertissement bourré de défauts, qui ne fait jamais vraiment illusion, mais qui a cette aura bis et quelques ingrédients qui font pencher la balance non pas du côté favorable, mais du côté « ça se regarde ». Loin cependant de la maîtrise d’un League of Gods qui nous fait dire que le blockbuster chinois à de beaux jours devant lui, et que cette Grande muraille n’est qu’un boulon de ce qui pourrait devenir une redoutable machinerie. M’enfin, une chose est sûre ici : on n’a pas affaire à du Tsui Hark.



Ferdinand Bardamu

Note du rédacteur : 2,5/5 (Moyen) 

lundi 16 janvier 2017

La mécanique de l'ombre, de Thomas Kruithof


Premier film de Thomas Kruithof, co-écrit par Yann Gozlan, réalisateur de Captifs et d’Un homme idéal, il rejoint donc une mouvance du cinéma de genre en France débutée par Fred Cavayé et son co-scénariste Guillaume Lemans, lui aussi co-scénariste sur Un homme idéal, toujours de Yann Gozlan (tout est lié !), celle qui aime partir d'un postulat très "cinéma français" pour glisser vers le genre le plus total.
Kruithof parvient-il à concilier divertissement grand public et genre comme ses pairs ?

Après un burn-out, Duval (François Cluzet) se retrouve au chômage pendant près de 2 ans. Après un appel mystérieux, il se retrouve à travailler pour une entreprise de sécurité privée. Son travail est aussi secret qu’il est simple : retranscrire le contenu d’appels téléphoniques à l’aide de sa machine à écrire…

Froid, paranoïaque, bien mis-en-scène, réaliste et premier degré jusqu’au bout : on se laisse entraîner avec plaisir dans la descente aux enfers de Duval, qui débute dès la première scène : en l’espace de 5 minutes, Thomas Kruithof nous montre comment d’une situation à priori anodine (le patron demande à l’employé de remettre un dossier pour le lendemain matin), un homme se retrouve complètement brisé. En 5 minutes, ce que l’on voit est plus efficace que ¾ des films « sociaux » qu’on mange à la pelle depuis des années.

Le film contient peu d’action, on est dans une retenue et une économie rare : le réalisateur a conscience de son budget et n’essaie pas de « faire comme », mais se sert de son art pour en raconter le plus possible avec peu. Dans cette logique d’économie, les dialogues sont brefs, concis, sans surgras, et surtout servis par des acteurs impliqués et merveilleusement bien dirigés : Denis Podalydès, le grand manitou, passe de patron sympathiquement mystérieux à gros con effrayant en un regard; le trop rare et pourtant fantastique Simon Abkarian incarne un espion grande gueule, sympathique mais violent; Sami Bouajila tout en retenu et bien évidemment un François Cluzet qui achève de nous prouver qu’il est l'un des meilleur « everyday hero » du cinéma français.

Toutes ces interprétations nous plongent dans 
une paranoïa de tous les instants :  on se sent aussi perdu que le personnage, ne pouvant compter que sur lui-même pour en sortir. Le film évite d’être trop manichéen, notamment avec une fin (bien qu’expéditive, on y reviendra) qui amène un discours nuancé après avoir cru à un basculement avec les gentils/les méchants.
Bien entendu, s’inscrivant dans le film d’espionnage, on ne peut éviter un discours politique, ici très discret et avec suffisamment de distance pour l’évoquer sans lourdeur : sur fond de montée des extrêmes, on évoque le mensonge que peuvent provoquer l’interprétation des images, on prend soin de montrer le danger des écoutes, du numérique mais, plus original, de l’analogique : s’il doit taper à la machine à écrire, c’est pour éviter la fuite d’informations, et permet donc à une entreprise plus que louche une impunité totale. Le classique débat est posé : la sécurité au détriment de la liberté est-elle une solution viable ? Peu importe, de toute manière, peu importe la réponse : au final, c’est nous qui trinquons pour des gens qui n’ont que pour seul but le pouvoir.


Malheureusement, le film n’est pas exempt de défaut : sa structure et son rythme, partant de l’idée de faire du « métro-boulot-événement étrange-dodo »,  ne fait jamais avancer l’intrigue, qui n’avance que grâce à l’intervention d’un personnage tiers. Voir un vieil homme tout nu à travers le judas, ça met une ambiance bizarre, mais ça ne sert à rien. À part nous faire une espèce de screamer à la Derrick.
C’est d’autant plus dommageable que le film aurait gagné à être plus long, notamment dans sa 3ème partie, beaucoup trop expéditive et entraînant une fin bavarde pour nous expliquer ce que l’on aurait pu comprendre rapidement si seulement Thomas Kruithof s’était permis de distiller plus d’indices tout au long de son film. On aurait aussi aimé voir un peu plus de « folie » (pour un premier film, c’est malheureusement souvent le cas), qu’on pense ressentir à certains moments : il aurait pu nous offrir un film d’espionnage beaucoup plus sensoriel que la normale.

Le film est aussi beaucoup trop froid. Si cela participe à la bonne ambiance du tout, certaines relations entre les personnages en pâtissent : la première victime de cette froideur, le personnage féminin incarné par l’attachante Alba Rohrwacher. Si Thomas Kruithof et Yann Gozlan ont eu l’intelligence de ne pas nous imposer une romance malvenue avec le personnage principal, elle aurait mérité d’être présentée comme une bouffée d’air frais pour ce dernier. En dehors de lui, elle n’existe pas, et ne sert que de prétexte pour un twist contestable, puis éventuellement offrir un épilogue un peu plus optimiste à notre héros. D’autant plus visible qu’elle est la seule femme du casting. Dommage, son personnage laissait présager un traitement intéressant.

En conclusion, malgré une froideur trop présente et un rythme qui ne parvient pas vraiment à se mettre en place, occasionnant un troisième acte trop expéditif, le film est de très bonne facture. Jamais il ne s’excuse d’être un film de genre français et surtout il a l’intelligence de rester premier degré, jusque dans les manteaux longs des espions, sans paraître ridicule. Grâce à une excellente direction d’acteur et un véritable travail sur l’image et sur le son, on se prend facilement au jeu.
On est vraiment passé près du grand film, on surveillera Thomas Kruithof et ses amis, mentionnés dans l’introduction, qui tous représentent un véritable espoir pour le cinéma de genre grand public en France.





Antoine T.

Note du rédacteur : 3,5/5 (Bon)